Communiqué
Le décès de Jean-Claude Duvalier ne dispense pas l’État haïtien de ses obligations
Une crise cardiaque a terrassé à mort le dictateur Jean-Claude Duvalier le samedi 4 octobre 2014. S’il n’y avait pas eu le renversement du régime le 7 février 1986, Haïti serait encore aujourd’hui sous la férule de la dynastie Duvalier puisque, selon les constitutions duvaliériennes de 1971, 1983 et 1985, le pouvoir était « à vie » et héréditaire.
Sans ce frein du 7 février 1986, Jean-Claude Duvalier aurait été le chef de l’État jusqu’à sa mort et son fils, François-Nicolas Duvalier, qui revendique publiquement l’héritage de son grand-père François Duvalier, lui aurait succédé. Ce faisant, nulle autre personne ne pourrait prétendre occuper la fonction présidentielle. Cette donnée semble échapper au Président de la République, Monsieur Michel Martelly, qui s’empresse de rendre hommage au dictateur déchu, en le qualifiant « d’authentique fils d’Haïti », et d’exprimer ses sympathies à ses partisans qui sont légion dans son entourage. Ainsi, pour la énième fois, la présidence tente d’imposer le silence et l’oubli, en bafouant la mémoire des milliers de victimes des 29 ans de dictature, en niant le droit peuple du haïtien à la vérité et à la justice.
La mort de Jean-Claude Duvalier met certes un terme aux poursuites contre sa personne. Cependant, cela n’élimine en aucun cas la responsabilité des consorts, donc des individus qui ont contribué à ce que des crimes soient massivement perpétrés. Nombre de ces consorts sont vivants et sont nommément cités dans le réquisitoire du Ministère public, dans les dépositions des plaignantes et plaignants et dans celles de divers témoins. Le décès de Jean-Claude Duvalier ne peut servir de prétexte pour perpétuer l’impunité. L’État haïtien à toujours l’obligation d’enquêter et de sanctionner les coupables. Le gouvernement ne peut donc se borner à déclarer qu’il laisse la justice « suivre son cours », en ignorant délibérément le fait que les poursuites contre Jean-Claude Duvalier et consorts ont été initiées par l’État haïtien lui-même, pour crimes contre l’humanité et crimes financiers, et sans moindrement fournir au système judiciaire les moyens humains et matériels de réaliser les enquêtes. Le gouvernement ne peut non plus feindre d’ignorer l’impact des prises de position du Président de la République. L’affaire Jean-Claude Duvalier et consorts a été maintenue ouverte grâce à l’engagement des membres du Collectif contre l’impunité et d’autres plaignants représentés par le Bureau des avocats internationaux (BAI).
Une certaine rhétorique voudrait faire croire qu’une page est tournée avec le décès de l’ex tyran. Il n’en est rien, puisque les mécanismes de la dictature n’ont pas été mis en lumière, le bilan des exactions commises n’a pas été officiellement dressé, les responsabilités n’ont pas été dument établies, la vérité n’a pas éclaté au grand jour et le devoir de mémoire reste et demeure une absolue nécessité. C’est en continuant à livrer le difficile combat contre l’impunité que l’esprit de la constitution de 1987, fondée sur le refus de la dictature et le respect des droits humains, sera respecté et qu’Haïti pourra véritablement construire un État de droit démocratique.
Le combat continue!
5 octobre 2014
Danièle Magloire, Coordonnatrice
Collectif contre l’impunité
Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains
Centre œcuménique des droits humains (CEDH)
Kay Fanm (Maison des femmes)
Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)
Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)
Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - cedh@cedh-haiti.org
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Visitez le site Haïti lute contre l’impunité: www.haitiluttecontre-impunite.org
Le décès de Jean-Claude Duvalier ne dispense pas l’État haïtien de ses obligations
Une crise cardiaque a terrassé à mort le dictateur Jean-Claude Duvalier le samedi 4 octobre 2014. S’il n’y avait pas eu le renversement du régime le 7 février 1986, Haïti serait encore aujourd’hui sous la férule de la dynastie Duvalier puisque, selon les constitutions duvaliériennes de 1971, 1983 et 1985, le pouvoir était « à vie » et héréditaire.
Sans ce frein du 7 février 1986, Jean-Claude Duvalier aurait été le chef de l’État jusqu’à sa mort et son fils, François-Nicolas Duvalier, qui revendique publiquement l’héritage de son grand-père François Duvalier, lui aurait succédé. Ce faisant, nulle autre personne ne pourrait prétendre occuper la fonction présidentielle. Cette donnée semble échapper au Président de la République, Monsieur Michel Martelly, qui s’empresse de rendre hommage au dictateur déchu, en le qualifiant « d’authentique fils d’Haïti », et d’exprimer ses sympathies à ses partisans qui sont légion dans son entourage. Ainsi, pour la énième fois, la présidence tente d’imposer le silence et l’oubli, en bafouant la mémoire des milliers de victimes des 29 ans de dictature, en niant le droit peuple du haïtien à la vérité et à la justice.
La mort de Jean-Claude Duvalier met certes un terme aux poursuites contre sa personne. Cependant, cela n’élimine en aucun cas la responsabilité des consorts, donc des individus qui ont contribué à ce que des crimes soient massivement perpétrés. Nombre de ces consorts sont vivants et sont nommément cités dans le réquisitoire du Ministère public, dans les dépositions des plaignantes et plaignants et dans celles de divers témoins. Le décès de Jean-Claude Duvalier ne peut servir de prétexte pour perpétuer l’impunité. L’État haïtien à toujours l’obligation d’enquêter et de sanctionner les coupables. Le gouvernement ne peut donc se borner à déclarer qu’il laisse la justice « suivre son cours », en ignorant délibérément le fait que les poursuites contre Jean-Claude Duvalier et consorts ont été initiées par l’État haïtien lui-même, pour crimes contre l’humanité et crimes financiers, et sans moindrement fournir au système judiciaire les moyens humains et matériels de réaliser les enquêtes. Le gouvernement ne peut non plus feindre d’ignorer l’impact des prises de position du Président de la République. L’affaire Jean-Claude Duvalier et consorts a été maintenue ouverte grâce à l’engagement des membres du Collectif contre l’impunité et d’autres plaignants représentés par le Bureau des avocats internationaux (BAI).
Une certaine rhétorique voudrait faire croire qu’une page est tournée avec le décès de l’ex tyran. Il n’en est rien, puisque les mécanismes de la dictature n’ont pas été mis en lumière, le bilan des exactions commises n’a pas été officiellement dressé, les responsabilités n’ont pas été dument établies, la vérité n’a pas éclaté au grand jour et le devoir de mémoire reste et demeure une absolue nécessité. C’est en continuant à livrer le difficile combat contre l’impunité que l’esprit de la constitution de 1987, fondée sur le refus de la dictature et le respect des droits humains, sera respecté et qu’Haïti pourra véritablement construire un État de droit démocratique.
Le combat continue!
5 octobre 2014
Danièle Magloire, Coordonnatrice
Collectif contre l’impunité
Regroupement de plaignants-es -contre l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier et consorts- et d’organisations de droits humains
Centre œcuménique des droits humains (CEDH)
Kay Fanm (Maison des femmes)
Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement (MOUFHED)
Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)
Point focal: Centre œcuménique des droits humains (CEDH) - cedh@cedh-haiti.org
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